Loup y es-tu ?
L’enfance est ce moment de naïveté où s’entremêlent féérie, imagination et poésie nourries par les contes et légendes. Leurs illustrations fantastiques ont largement contribué à mon imaginaire. L’enfance est également hantée par les incompréhensions et inquiétudes d’un monde adulte perçu souvent comme obscur et menaçant.
Composer mon regard en une succession de diptyques est une façon de présenter cet entrelacement. Peur et poésie s’enchâssent dans le regard du spectateur, lui laissant le champ libre pour recomposer l’image intérieure de sa propre enfance. Ainsi peut-il passer d’un espace à l’autre, libre à lui de refonder –au besoin ou pour le plaisir - son propre récit et de retrouver cette perception du monde, et de réfléchir à celui qu’il donne à voir.
Dans les images l’enfant est à la fois spectatrice, dubitative, inquiète, perdue et curieuse. Elle se perd dans un décor naturel fantastique, tantôt d’apparence animale menaçante ou tantôt brumeuse. Le décor végétal d’un graphisme appuyé est asséché, mais l’élément humide est tangible. Cette ambiance renforce le caractère angoissant et énigmatique du monde adulte. Mais elle rappelle aussi la capacité de notre regard à le transformer pour le rendre plus acceptable comme le ferait la pensée de l’enfant qui recourt à la magie pour apaiser ses angoisses.
Forêt qui jadis ...
Forêt qui jadis, abritait nos murmures,
Dis moi ! Dis moi !
L’ai-je vécu, ou l’ai-je lu ?
Comment ?
Des souvenirs et des rires, de cette vibrante idylle,
Rien n’est plus ?!
Comment ?
Des nuits enchanteresses et des radieuses promesses,
Rien n’est plus ?!
L’ai-je vécu, ou l’ai-je lu ?
La colère me ronge et le souvenir m’obsède.
Ne pouvais-tu m‘épargner, universelle Douleur ?!
La haine m’écrase et je veux que tout meure !
Comment, ma légende, peux-tu être aussi laide ?
L’ai-je vécu, ou l’ai-je lu ?
Mon esprit se tord et chaque jour j’attends.
Mais rien ne vient.
Mes yeux se brouillent en chaque lieu je guette,
Mais rien ne vois.
L’ai-je perdu, ou l’ai-je lu ?
Et puisque rien n’est plus et puisque rien n’est vie,
De mes doigts tremblant
et de mon âme en noir
De mon cœur en sang
et de mes mains meurtries
Je referme l’histoire,
Comme on achève un livre.
Images hantées - Anté images
Lieux hantés. Hantés par l’Histoire. Histoire d’ici, Histoire d’avant.
J‘y entre, j’y erre, fantôme cherchant les âmes perdues,
Des âmes qui se cachent, que je sens, là, que j’écoute.
Happée par le passé, je devine, j’entrevois, je sens et je ressens.
Je m’assoie, mes yeux se perdent.
Elles s’approchent, surgissent et m’emmènent.
Je les suis.
Présences qui suent, qui prient, qui larmoient et murmurent.
J’éprouve.
Autour de moi des voix tournoient, me racontent et me montrent.
Je pleure aussi.
Rencontres, ailleurs, ici, lointaines et si présentes.